15/12/2013
Danse : Alonzo King, Chaillot
Samedi soir, il fait froid sur Paris, mais j'ai des places pour le théâtre national de Chaillot... Au programme : Alonzo King. Tout ce que je sais de lui, c'est qu'il est américain, noir, et plus ou moins inconnu en France, sauf de quelques milieux bien informés qui commencent à l'encenser.
Une première partie à la technique irréprochable, mais qui je reste un peu "dehors". Est-ce la cantatrice, dont la voix dans les basses ne me convainc pas? Est-ce le côté assez radical de cette chorégraphie dont l'écriture complexe ne se laisse pas apprivoiser si facilement?
Après l'entracte, une deuxième partie, plus longue dit le programme. Plus longue? Alors, pourquoi est-ce que lorsque la lumière s'éteint, lorsque les applaudissements éclatent, j'ai l'impression que cela vient juste de commencer? Parce que là, le miracle s'est accompli, celui qui fait que de spectateur, on devient sujet frémissant, vibrant, emporté par la virtuosité des interprètes, subjugué par les lumières, par ces corps dont on sent la parfaite maîtrise académique, mais qui la transcendent dans des torsions, des envolées, des cassures qui sont autant d'élans. La fougue des danseurs, l'écriture impeccable du chorégraphe, le choix audacieux des musiques, le travail somptueux du sculpteur de lumières Jim Campbell, se conjuguent dans une danse sensuelle et animale qui magnifie les corps.
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28/11/2013
Danse : Milonga
La Milonga, ce sont ces soirées populaires où l'on danse le Tango, à Buenos Aires. Sidi Larbi Cherkaoui a séjourné en Argentine, où il s'est imprégné des codes de cette danse éminemment voluptueuse. Comme à son habitude, il s'empare de la culture profonde du tango pour mieux la magnifier.
Cela donne 1 h 30 d'un spectacle à couper le souffle, éblouissant de brio, de sensualité et de tendresse. Milonga, c'est la rencontre de danseurs de tango et de danseurs contemporains, qui vont se répondre, s'étreindre, se défier pour encor se retrouver. Un hymne au corps à corps, qui fait écho au style de Cherkaoui, ancré dans le toucher.
Une nouvelle fois, le chorégraphe nous entraîne dans un tourbillon d'émotions, avec une mise en scène qui, si elle joue l'économie de moyens, sait s'imposer par des trouvailles de génie : les silhouettes découpées, les reflets des danseurs, les lumières quasi vivantes servent magnifiquement le propos, soulignant l'incroyable virtuosité des danseurs et la sensualité profonde des gestes.
Finalement, "sa danse-theâtre ressemble à une babel humaniste, où chacun grandit et apprend dans l'autre" (Les nuits de Fourvière)
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26/10/2013
Expo : Kanak, L'Art est une Parole
Musée du Quai Branly.
Un petit mot d'abord sur le musée lui-même : je suis toujours emballée par son architecture. Les jardins d'abord, encore luxuriants, qui se parent de couleurs cet automne; j'ai pris le temps d'y flâner et de m'arrêter dans le jardin des tortues, une petite oasis de calme et de sérénité. Ensuite seulement, je suis entrée, une douce pénombre accueille le visiteur, comme pour se dépouiller de l'extérieur, se préparer à la rencontre. Je remonte la "rivière de mots" qui nous guide jusqu'au coeur du musée; c'est drôle, on pourrait penser que seuls les enfants s'amuseraient à suivre ses méandres, mais non, quelques adultes le font aussi, retrouvant sans doute le plaisir des trajets imaginaires qu'il fallait respecter sur les trottoirs de notre enfance, au risque de se perdre - ou de se faire dévorer! Enfin, j'arrive sur le plateau, hésitant encore sur le chemin à prendre.
Pour aujourd'hui, ce sera une promenade à Madagascar, avec ses poteaux funéraire somptueux. Une petite balade du côté des tissus moyen-orientaux complétera cette visite :
Après cette jolie balade dans le musée, je vais voir ce qui m'a attirée là : l'exposition "Kanak, l'Art est une Parole". Dès l'entrée, les poteaux donnent le ton, on va trouver dans cette exposition de la culture, des objets "muséiques" mais aussi de la culture contemporaine et vivante. Ici, on ne fige pas la culture Kanak, comme une civilisation disparue, mais on la donne à voir, à vivre, dans ses relations souvent conflictuelles, parfois violentes, toujours vivaces. Dans la première partie, les Kanaks parlent d'eux-même; accompagnée par leurs voix, leurs chants, je déambule, impressionnée par les chambranles sculptés des Grandes maisons, fascinée par la beauté des haches ostensoirs de Jade et par les casses-têtes en bois. Dans la seconde partie s'expose le(s) regard(s) porté(s) par les occidentaux sur ce peuple, mais aussi sa réappropriation de sa culture, symbolisée par le glissement de "canaques", le mot colonial et méprisant, vers Kanak, affirmation de soi et de sa fierté. Des "découvreurs" de ces terres, à la déportation des Communards, de la colonisation aux luttes des années 80, l'histoire des douloureux rapports entre la métropole et la Kanaky y est bien présente. On y croise aussi la grande figure de Jean-Marie Tjibaou et l'histoire de la création - et de la symbolique, du drapeau Kanak.
Magnifique hommage au peuple et à culture Kanak, cette exposition peut apparaître comme le pendant positif de l'exposition universelle qui vit les "sauvages" exposés comme des animaux en cage. Au musée du quai Branly, c'est le respect qui domine, le désir de la rencontre et du partage.
C'est jusqu'au 26 janvier 2014, et surtout, c'est à ne pas manquer!
12:07 Publié dans Sorties : expos, spectacles... | Lien permanent | Commentaires (0)