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29/02/2016

Communardes, tome 3

COMMUNARDES.jpgCommunardes ! Nous ne dirons rien de leurs femelles – Tome 3, Wilfrid Lupano et Xavier Fourquemin

Marie n’est pas une intellectuelle, ni une aristocrate, encore moins une militante. La Commune, elle aurait pu ne pas la vivre, et continuer à accumuler de la rancœur et de l’amertume dans sa vie de servante, d’ouvrière à la journée. Seulement, la Commune est là et, avec elle, une occasion en or de régler les comptes, de laisser sortir enfin cette froide colère qui lui tord le ventre, de redresser la tête, de se venger de ceux qui ont fait de sa meilleure amie Eugénie un fantôme, dont le rire dément résonne dans une crypte de damnées. La Commune promet que les lâches et les oppresseurs d’hier vont payer. Ça tombe bien, Marie en connaît quelques-uns. Et elle est prête à se salir les mains...

Vents d’Ouest publie le troisième et dernier opus de cette saga consacrée à des personnages de femmes dans la Commune. Et quelles femmes ! De l’aristocrate russe, amie de Marx, qui organise des ateliers féminins autogérés (L’aristocrate fantôme) à la môme délurée qui prend la tête d’une bande de gamins pour tenter de sauver les éléphants du zoo tout en massacrant les Versaillais (Les éléphants rouges), ce sont des héroïnes fortes et hautes en couleur qui racontent cet épisode tragique de l’histoire de France, et surtout la place des femmes dans cette aventure.

Dans ce troisième tome, le plus sombre sans doute, la jeune Marie, servante chez de riches bourgeois, dont le père, gradé de l’armée et féru de chasse, exhibe fièrement les armoiries de la famille comme ses trophées, coule des jours heureux en compagnie d’Eugénie, la fille de la maison. Mais cette quiétude ne durera pas. Quand Eugénie tombe enceinte du beau libraire qui lui a fait lire Proudhon et Bakounine, elle est enfermée manu militari dans un couvent et Marie chassée.

Quelques années plus tard, on la retrouve sur les barricades, servant la soupe aux Communards, trouvant là l’occasion de se venger des oppresseurs d’hier. Elle y croise le libraire, aujourd’hui marié. Lorsque les insurgés attaquent le couvent de Picpus pour réquisitionner ses chambres, elle découvre la pauvre Eugénie, mais dans quel état… Le scénario ménage ce qu’il faut de surprises et de rebondissements, on reconnaît même au gré des cases l’aristocrate anarchiste et la petite fille rêveuse des premiers tomes (les histoires peuvent toutefois se lire indépendamment). Beaucoup d’émotion dans ce volume, parfaitement servi par le dessin précis et très réaliste de Xavier Fouquemin. Les tonalités chaudes et joyeuses des moments heureux alternant avec les couleurs plus sombres des instants plus tragiques.

Si l’ensemble reste bien triste, et rien d’étonnant à cela, nous connaissons tous l’effroyable fin de cette utopie, il y souffle malgré tout un vent de liberté et d’espoir ; ces femmes, dont le sort n’était guère enviable, même au sein de cette « révolution », ont semé les jalons d’un mouvement qui, s’il n’est pas au bout de ses peines, a vu les femmes s’émanciper et gagner des droits nouveaux.

Le regard que les auteurs posent ici sur la Commune (un sujet peu traité en général), avec un angle original (les femmes et leurs luttes) fait de ce triptyque une vraie réussite, à se procurer de toute urgence !

 

Vents d’Ouest – février 2016 – 14,50 €

11:35 Publié dans Lecture BD | Lien permanent | Commentaires (0)

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